Profitant de la présence de Danielle BERTHOLDT, artiste plasticienne venue animer le stage de sculpture du mois de septembre, nous nous sommes rendus à l’exposition “RODIN MAILLOL Face à Face”, actuellement proposée au Musée Hyacinthe RIGAUD de Perpignan.
En déambulant d’oeuvre en oeuvre, il est aisé de comprendre pourquoi
ces deux hommes nés à 21ans d’écart, si différents par leurs oeuvres ont éprouvé une profonde admiration pour leur talent respectif.
Auguste Rodin est déjà bien connu lorsque le jeune Aristide MAILLOL découvre pour la première fois « les Bourgeois de Calais » réalisés par son contemporain. Ayant passé la première partie de sa vie à peindre, Maillol aborde la sculpture assez tardivement. La force et l’audace du travail de “son Dieu” le subjuguent.
Ses personnages aux muscles bandés donnent des oeuvres étonnamment puissantes, si puissantes qu’un fragment de corps, une main, un pied aux orteils non finis suffisent à démontrer le génie de Rodin.
En juxtaposant les oeuvres de l’un et l’autre, l’exposition nous amène à comprendre combien leurs sensibilités sont différentes et en quoi ils s’opposent.
Les nymphes de Maillol affichent une sérénité mythique au côté des 3 Ombres de Rodin, figures damnées des portes de l’Enfer.
Et même lorsque le premier se risque à produire « l’Action Enchaînée » au dos scandaleusement viril, il n’atteint jamais la force ni la composition dramatique des oeuvres de son aîné.
L’un affiche la douceur, l’autre la nature humaine dans ce qu’elle a de plus dramatique. « La douleur « de Rodin, bouche muette ou cri du fond des âges, nous rappelle notre vulnérabilité.
Rodin disait à l’époque :
« Quand un bon sculpteur modèle des corps humains, il ne représente pas seulement la musculature, mais aussi la vie qui les réchauffe. »
La vie tout aussi présente, semble plus simple chez MAILLOL.
Après avoir vu cette magnifique exposition temporaire, allez donc visiter sa maison à Banyuls-sur-Mer. Modeste métairie, au creux d’un vallon où coule une rivière, c’est un havre de paix digne des Géorgiques. C’est là que l’artiste catalan, fils d’épicier a puisé cette « force tranquille ».
Cette vie simple et frugale au milieu des vignes centenaires a fait de Maillol un artiste sans fioritures, ni mouvement maniéré. “Je veux sculpter l’impalpable” disait-il. La ligne pure du corps juvénile de Dina Vierny, son modèle, suffit. La grâce de Pomone, la Méditerranée, comme une évidence. En la voyant Gide s’exclame : “Elle est belle, elle ne signifie rien ; c’est une œuvre silencieuse.” Tout est dit.
Vous pourrez voir un documentaire ancien, tourné peu avant la mort du sculpteur en 1944.
Cet homme aux yeux plus clairs que la mer qui l’a vu naître, à l’accent aussi rocailleux que les collines de schistes qui l’entourent, barbe blanche et costume de vigneron, semble étonné de l’intérêt que le journaliste lui porte.
Aux derniers rayons du soleil qui incendient les vignes, alors que l’ouillade cuit à petits bouillons dans sa cuisine émeraude, il installe sa toile en pleine nature … et peint.
Inoubliable moment d’authenticité.
Maillol repose en paix dans le jardin au bord de la Roume. Sur sa tombe, « la Méditerranée » qui fit sa renommée.
A chacune de mes visites, j’ai eu ce sentiment étrange que je pouvais encore aujourd’hui m’attendre à le rencontrer à l’ombre suave des micocouliers, tant sa présence a imprégné les lieux.
Expo Rodin- Maillol Face à Face Musée Hyacinthe Rigaud Perpignan jusqu’au 3 novembre 2019.
Merci à Danielle pour sa visite commentée.
Ouillade ou ollada : soupe populaire catalane faite de haricots, lard et jarret de porc.
Bravo Anne-Marie, nous sommes heureux de te lire, Nicolas et moi, au coin du feu, à savourer la couleur de tes mots..
Bisous des Normands
Quel bonheur toujours de te lire!
Ce petit reportage d’une visite à deux grands sculpteurs nous ravit les sens.
Bien-sûr, rien ne vaut d’aller les rencontrer en vrai. J’y vais de ce pas à l’heure de nos vacances, je vais enfin prendre le temps. Merci de m’en avoir offert cet avant-goût de bonheur à venir.
J’ai ressenti beaucoup d’émotions lors de ma première visite à Maillol à Banyuls sur mer, tant le lieu est imprégné de sa présence.
A ce propos, l’envie me prend de relire “Le berger des abeilles” d’Armand Lanoux.
Bises
A très bientôt de te relire.
Lydie
Tu écris bien, Anne-Marie, c’est un plaisir de te lire.
Merci Anne-Marie de nous offrir cette visite racontée de si vivante façon.
Je suis allée voir cette exposition cet été en famille et j’ai trouvé intéressant le parallèle qui est fait entre les œuvres des deux célèbres sculpteurs. La Métairie à Banyuls, lieu de vie et de travail d’Aristide Maillol mérite également une visite.
Merci Anne-Marie pour ce récit comme toujours très bien écrit, j’ai grâce à toi bénéficié d’une seconde visite.